Que faire de nos souffrances du passé ?
Que faire de nos souffrances passées, des événements plus ou moins difficiles que l’on a vécus et qui nous ont laissé des cicatrices intérieures ?
On entend souvent « Nos blessures nous ont rendu plus forts ». Oui l’expérience a pu nous rendre d’une certaine façon plus fort. Mais pourquoi alors il reste toujours comme une racine vaguement douloureuse ? Pourquoi alors si je crois être en paix, j’effacerais si je le pouvais cette pointe de ressentiment toujours plus ou moins présente ? Pourquoi je ne parviens pas à aimer profondément et sincèrement ces cicatrices que je porte en moi ?
Parce que la paix avec ces expériences n’est pas totale.
Elle est mentale mais elle n’est pas ressentie au plus profond de son être, de toutes ces cellules. La paix ressentie n’est que partielle, illusoire en réalité. Dès lors, on ne peut pas voir réellement la beauté de ces cicatrices qui nous constitue, c’est impossible.
La paix, est-ce que cela s’atteint ?
En se forçant à voir le positif de ce que l’on a traversé ? c’est une première étape peut-être mais c’est vain de croire que la paix s’y trouve.
Chercher à sentir la paix, cela revient à rejeter le reste de souffrances qui est encore là. C’est se rejeter soi-même.
Je pense que cela passe par un constat honnête et sincère de ce que l’on ressent. « Malgré tout le travail que j’ai fait sur moi, malgré la bienveillance que je m’apporte, malgré le travail de pardon aux autres et à moi-même, je ressens toujours quelque chose qui n’est pas heureux, en paix. » Accepter cela, dans un premier temps, est un pas immense. Ne pas écouter les pensées de déception et de jugement face à la tristesse qui peut naitre de ce constat. Mais accueillir cela, « là dans l’instant, c’est ce que je ressens ». Laisser la place à cette déception, cette tristesse, cette amertume et peut-être même ce désespoir de réaliser qu’on ne peut rien FAIRE alors pour effacer ses cicatrices de l’être et qu’on ne peut rien FAIRE non plus pour se forcer à les aimer, malgré tous nos efforts et notre cœur à être en paix…
Je crois que quelque chose doit passer par cela, cette honnêteté à sentir ce qui est présent, à sentir cette vulnérabilité en nous, notre impuissance au fond…
De l’impuissance à la pacification…
Impuissance. Ce mot semble détestable et pourtant… C’est dans l’arrêt de la lutte, de la force, de la résistance à l’impuissance à changer ce que l’on ressent que quelque chose de l’ordre d’une profonde pacification peut opérer. Elle n’est pas à obtenir, à mettre en œuvre. Elle ne peut advenir que quand on lâche prise. Un vrai lâcher prise, pas celui du mental mais celui de tout son être comme une abdication. Et accepter de ressentir le flot d’émotions qui vient avec cela pour les laisser passer… Je crois que c’est là qu’opère la magie de l’être, de l’âme humaine vers une transformation intérieure profonde dans laquelle on a juste à se laisser porter.
Accepter qu’il n’y ait rien à forcer, accepter tout ce que l’on ressent sans lutter contre, se laisser porter par la tempête intérieure et laisser œuvrer sans projection, sans attente, juste dans une confiance que ce qui se vit là nous transforme intimement et profondément…
Cela change radicalement avec nos modes de pensées habituels, c’est un profond retournement intérieur.
C’est cette acceptation profonde, totale et inconditionnelle de Soi, de tout ce que l’on est, de ce que l’on a vécu, de nos fragilités, nos ombres, nos cicatrices, qui révèle d’un coup la beauté du tout, de l’ensemble, de Soi.
A l’image du Kintsugi, cet art qui magnifie les céramiques cassées avec de l’or.
Acceptons notre beauté, qui nous sommes…